18 juin 2009

L’anti-sarkozysme est-il un humanisme ?


Vous avez quatre heures.
Réformer, réformer, réformer !", répètent sans cesse les sarkozystes en sautant comme des cabris. Mais derrière leur formule magique, sous le fallacieux prétexte de "moderniser" la France, il ne s’agit que d’orchestrer la régression sociale généralisée. Bouclier fiscal d’un côté, refus de l’augmentation du Smic de l’autre. Réforme de l’hôpital visant à privilégier une logique purement marchande, sabrage des remboursements aux malades à qui sont imposés les franchises médicales et augmentation pourtant record du déficit de la Sécurité sociale - que l’État commence par lui payer sa dette colossale ! -, qui justifiera de nouveaux tours de vis et consacrera l’ouverture au privé du juteux marché de la santé, accentuant encore la loi des deux vitesses : une médecine de luxe pour les riches tandis que les pauvres, incapables désormais de se soigner, n’ont qu’à crever. La démarche est parallèle en ce qui concerne l’économie : aides à gogo pour les entreprises d’un côté, salariés livrés au chantage patronal de l’autre. Et en bout de course, consacrant la faillite du débile "travailler plus pour gagner plus", l’explosion du chômage. En particulier celui des jeunes, qui n’empêche néanmoins pas nos gouvernants de suggérer un nouveau retardement du départ à la retraite. Hortefeux parle de 67 ans. Pourquoi pas 70, 75 ? Alors qu’il est quasiment impossible de retrouver un emploi à partir de 50 ans, voire avant... Et le flicage, encore et toujours, la chasse aux soi-disants "fraudeurs" et "tricheurs", la stigmatisation sociale, la stratégie des bouc-émissaires censée camoufler la faillite du système libéral. Emblématique à cet égard, la fusion de l’Anpe et des Assedic au sein de Pôle emploi, effective depuis le 19 décembre 2008. Officiellement, la mission de la nouvelle structure est de "mieux accompagner les demandeurs d’emploi dans leur recherche et aider les entreprises à recruter". Et dans la réalité ?

"Alors que les économistes annoncent que (l’) augmentation du chômage est d’une ampleur sans précédent depuis plus de trente ans, alors que nous savons qu’elle aura des effets profonds et durables sur l’emploi, le gouvernement et la direction de Pôle emploi n’ont d’autre objectif que de mettre à disposition du patronat de la main d’oeuvre à moindre coût, en agissant de façon coercitive sur les travailleurs avec ou sans emploi", dénoncent trois de ses syndicats, CGT, SNU et SUD, qui appellent les agents à se mettre en grève aujourd’hui, s’opposant "à toutes les directives" qui "transforment (les personnels) en auxiliaires de police", "aux convocations impératives des demandeurs d’emploi sous peine de radiation (...) et aux diverses formes de pression pour orienter les demandeurs d’emploi vers les métiers en tension, précaires et mal payés". En ce qui concerne les moyens, "le nombre de demandeurs d’emploi suivi par conseiller est trois fois plus élevé qu’il ne le devrait, et la croissance du nombre de dossiers d’indemnisation provoque des embouteillages", expliquent les syndicats, qui exigent "une augmentation des effectifs de Pôle emploi conséquente, assortie de formations indispensables pour mener à bien des missions répondant aux besoins des usagers, dans le respect du service public", ainsi que "la fin de la sous-traitance aux opérateurs privés de placement, la titularisation des salariés en CDD", et rejettent "le recours à l’intérim". Une démarche résumée en une phrase : "La désorganisation des services provoquée par la course folle à la fusion doit être stoppée".

Concrètement, "Le taux de chômage a fait un bond brutal au premier trimestre, d’une ampleur inédite depuis 1975, frôlant les 10%, écrit 20 minutes. Des agences se sont retrouvées avec 150 demandeurs d’emploi à suivre par conseiller, alors que le gouvernement en préconise 60. Et la plate-forme téléphonique du 3949, dont les tarifs avaient déjà suscité la polémique, est saturée." "La coûteuse plateforme téléphonique du 39 49 est devenue le passage obligé de la « mise en relation » avec les agents. Il est moins que jamais possible d’avoir affaire à quelqu’un pour connaître ou établir ses droits, les ouvrir ou faire un recours", dénonce la Coordination des précaires et intermittents d’Île de France, qui stigmatise Pôle emploi en une machine à précariser, protestant du "problème de l’absence d’interlocuteur subi par les chômeurs : comment sans accueil au guichet prévenir d’une absence à convocation ? Comment exercer le droit d’être accompagné par la personne de son choix lorsqu’un conflit ou un problème de droit intervient et qu’il n’y a pas d’accueil physique ?" humaConcernant "la fin de la sous-traitance aux opérateurs privés de placement", L’Humanité exhume une déclaration de l’actuel PDG de Pôle emploi : « Pour des populations comparables, les résultats sont identiques entre l’ANPE et le privé, mais pour un coût trois fois plus faible à l’ANPE. On peut être public et efficace ! » C’est un certain Christian Charpy qui, en septembre 2006, vantait ainsi vaillamment les mérites du public face aux premiers assauts de la concurrence privée. À l’époque, le haut fonctionnaire est à la tête de l’ANPE et se doit de défendre un minimum la boutique. Aujourd’hui, le même dirige Pôle emploi, organisme issu de la fusion ANPE-Assedic, au statut juridique encore non identifié, mais dont l’esprit et les objectifs penchent nettement vers le privé. Et, fin mars, il déclarait que « les opérateurs privés de placement ne sont pas un sujet tabou au sein de Pôle emploi ». L’heure n’est plus à défendre le service public, mais à organiser sa privatisation, par le biais de deux moyens : d’un côté, la commande, à des organismes privés, de « prestations » ponctuelles comme les ateliers, bilans de compétences et stages d’appui à la recherche d’emploi ; de l’autre, l’externalisation complète, vers des opérateurs privés de placement (OPP), du suivi de demandeurs d’emploi, dès leur inscription au chômage. Phénomènes distincts, mais qui prennent tous deux de l’ampleur. (...) À partir de septembre et sur deux ans, 320 000 demandeurs d’emploi seront confiés au privé, dont le marché s’élargit, aux frais de l’État et de l’assurance chômage. Le budget OPP de Pôle emploi passe ainsi de 88 millions d’euros en 2008 à 100 millions en 2009, puis 200 millions l’an prochain. Une augmentation prévue de longue date, même si Christian Charpy cherche à la faire passer pour un « plan d’urgence » face à l’afflux de chômeurs dû à la crise." À ces chiffres s’ajoutent les 392 millions d’euros pour 2009 destinés à financer les prestations aux chômeurs sous-traitées, qui permettent au quotidien communiste de sous-titrer :"590 millions d’euros offerts au privé !"

Ajoutons enfin une précision sur le volet "auxiliaire de police", citant à nouveau la Coordination des intermittents et des précaires : "Depuis le 9 mars, date d’entrée en vigueur d’une mesure expérimentale visant à authentifier par lampe UV les pièces d’identités des demandeurs d’emploi, la résistance s’organise. « Huit cents agents de l’ex-ANPE sur les mille deux cents de Midi-Pyrénées refusent actuellement d’appliquer cette mesure destinée à faire la chasse aux sans-papiers », explique un porte-parole de SUD-Emploi 31. « Certaines agences ont beau avoir installé la lampe UV, les agents refusent de se former dessus », glisse une salariée. En vigueur depuis 2007 dans les Assedic, cette mesure est aujourd’hui élargie à l’ensemble de Pôle Emploi. « Sauf que les agents ANPE ont un statut public. Nous devons donc appliquer la loi qui nous demande de vérifier et non d’authentifier les papiers », poursuit cette syndicaliste". Comme un parfum prononcé de vichysme...

On trouve ainsi en la réforme créant Pôle emploi le raccourci de l’esprit antisocial de la politique gouvernementale. Et en ce jour où les bacheliers* planchent sur l’épreuve de philosophie, proposons un sujet : "L’anti-sarkozysme est-il un humanisme ?" Vous avez quatre heures.

*Bonne chance Djoolzy !

Merci Plume de presse

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